Délocalisons les patrons !

Le patronat s'égosille à nous expliquer que les travailleurs-euses français-es vivent dans un système de protections sociales inacceptables ! C'est d'ailleurs pourquoi ils délocalisent à tour de bras et/ou menacent de délocaliser. " Pas assez productifs, trop protégés ", nous entendons ça tous les jours aux infos ou sur notre lieu de travail. On doit d'abord répondre que nous ne sommes pas trop protégés, ce sont les travailleurs des pays " en voie de développement " qui ne le sont pas assez, nous y reviendrons. Ce n'est pas tout, lisez bien la suite…

L'heure de travail en France est l'une des moins chère des grands pays développés. Elle l'est par exemple de 14% par rapport à la moyenne européenne. -19% par rapport au Japon, -21% par rapport aux Etats-Unis. Les salarié-e-s français-es sont aussi parmi les plus productifs du monde : à égalité avec les Etats-Unis et 16% au dessus de la moyenne européenne.

Il est donc carrément indécent pour les patrons de crier à l'égorgement, et plus que légitime pour les travailleurs-euses de réclamer plus de partage des profits réalisés grâce à leur boulot ! Malgré ça, le festival de l'indécence continue, citons cet exemple relaté par " Le Canard Enchaîné " : la société LT production, numéro 1 mondial des étuis à lunettes délocalise son activité en Roumanie. Comme le Code du travail lui oblige, elle propose aux salarié-e-s éjecté-e-s un reclassement… à Lougoj en Roumanie pour un salaire mensuel net de 90€ ! Ils et elles ont sûrement dû sauter de joie en apprenant cette nouvelle et sauter dans le premier charter vers la Roumanie… Cela signifie au passage que le camarade Roumain touche 90€ par mois…



Eux, pratiquent la lutte de classe !


Si les patrons délocalisent, ce n'est pas parce que ce sont de pauvres entrepreneurs pris à la gorge par un système social collectiviste. Ils le font avant tout car les conditions d'exploitation sont plus favorables dans les pays où ils " délocalisent ". Maintenir la compétitivité de la France ? Tenir tête aux économies étrangères ? Quels intérêts sont défendus ? Et les intérêts de qui ? C'est bien le principe capitalise même qui est ici en jeu. Premièrement, les patrons licencient alors qu'ils engendrent des profits car le partage des richesses n'est pas leur objectif : ils recherchent la richesse et son accumulation, c'est de l'égoïsme - ou du capitalisme - pur et dur.
Deuxièmement, les pays " en voie de développement " sont maintenus dans la misère par nos pays à travers les institutions économiques internationales : salaires de misère, privatisations à marche forcée, répression anti-syndicale, chômage et misère endémique…développement durable y signifie exploitation durable. Troisièmement, tout cela donne raison au bon vieux slogan " les patrons ont besoin de toi, tu n'as pas besoin d'eux ". Ils créent des richesses grâce à notre travail, ils nous licencient pour nous maintenir dans un climat de crainte et d'insécurité sociale, ils critiquent à tout va le droit du travail et le cassent tant qu'ils le peuvent, ils favorisent l'exploitation et le " sous-développement " des pays du Sud pour maximiser leurs profits et anéantir la redistribution.

On peut écrire pour résumer qu'ils pratiquent à tout va la lutte de classe alors qu'ils la proclament morte ! Les patrons délocalisent… délocalisons les patrons !


Hiver 2004/2005 - Joke A Dit !!! Editorial

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