POUR
UN ANTI-POUVOIR RADICAL
Le
pouvoir… voilà ce à quoi ils et elles concourent tous et ce pour quoi
ils s'étripent. De déchirements fratricides, en alliances stratégiques,
les danses du grand bal électoral sont belle et bien ouvertes. Les danseurs
sont nombreux sur la piste mais le ballet est pitoyable. Restons donc
sur le bord du dancefloor pour essayer de comprendre leurs mouvements.
Si leurs programmes sont opaques comme du jus du boudin - de la " rupture
tranquille " de Sarko au " désir d'avenir " de Royal, leur ambition partagée
est claire comme de l'eau de roche : l'ivresse du pouvoir. Comment faire
réellement confiance à un individu qui attache tellement d'importance
à accéder à la fonction suprême ? Fonction suprême d'un système décadent,
basé sur l'inégalité sociale et les exploitations, sur l'aristocratie
d'Etat et la domination de classe, sur une conception patriarcale de la
politique : un régime où un individu unique incarne la volonté de l'Etat
et l'unité d'un pays pourtant traversé par des antagonismes forts. Rappelons-leur
quelques événements récents : le référendum européen, novembre 2005 ou
encore le mouvement " anti-CPE ". Rappelons-leur qu'en d'autres temps,
ceux qui prétendaient incarner cette unité malgré les évidences, incarnation
de droit divin à l'époque, passaient à la guillotine…
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Le
Pen, traîne sa haine malsaine en se faisant passer pour un grand-père
respectable. Sarkozy et sa clique se déchirent pour accéder à l'investiture,
sans oublier de continuer à faire passer des lois réactionnaires et pro-patronales
discrètement. Bayrou tente d'occuper un espace social-mou déserté par
le PS. Royal incarne la ligne droitière de son parti " socialiste " et
mise sur le mécontentement général. Voynet se débat dans un écologisme
qui n'a de vert que le nom. Buffet et son appareil bureaucratique flingue
les espoirs d'un renouveau à gauche. Quand à la nébuleuse de l'extrême
gauche, elle ne semble pas encore prête à sortir de ses dogmes et vérités
établies. Tous réclament le pouvoir, concourent à intégrer l'aristocratie
d'Etat (pouvoir, sièges, postes, avantages en tous genres et construisent
leurs stratégies en fonction de cette ambition.
Rappelons-le à l'esprit des candidats : la démocratie, c'est théoriquement
l'absence de pouvoir, c'est l'absence de titre à gouverner, c'est l'absence
d'experts en politique. La démocratie ne peut être qu'une an-archie, une
absence de pouvoir, elle ne peut exister que dans la mesure où il existe
des moyens d'écarter du pouvoir ceux qui l'aiment trop*. Imposons-nous
à l'esprit des candidats, en allant voter ou en refusant de participer
à ce simulacre, en développant des résistances de toutes formes. La politique
nous appartient autant qu'à eux… si ce n'est plus ! Nos désirs sont des
ordres… nos désirs sont le désordre.
* Voir Jacques Rancière, La Haine de la démocratie,
La Fabrique, Paris, 2005 et John Holloway, Change the world without taking
power, Pluto Press, Londres, 2002.
Hiver
2006/2007 - Joke A Dit !!! Editorial
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